Sri Swami Ajatananda Saraswati
by Atma Chetan
Le Soi n’est pas né, et ne mourra jamais. Il ne vient de nulle part et rien n’émane de lui. Non-né, éternel, toujours présent, primordial, il ne périt pas même lorsque le corps est détruit.
— Katha Upanishad I.2.18
La Rencontre Spirituelle avec l’Inde
Né en France le 10 mai 1944, Marc a toujours ressenti une intense attirance pour la vie spirituelle. En janvier 1969, un ami commun lui présente S.S. Swami Chidananda Saraswati, le président de la Divine Life Society, alors en visite en France à Lyon. Marc écrit dans son journal que le darshan [1] de Swami Chidananda fut sa première rencontre spirituelle vivante avec l’Inde.
La même année, Marc écrit une lettre à Swami Abhishiktananda, ce qui sera le début d’une correspondance qui aboutira à leur rencontre. Après avoir servi pendant deux ans comme enseignant au Niger, Marc est venu en Inde en octobre 1971 et a rencontré Swami Abhishiktananda à Delhi. Le mois suivant, il rencontre Swami Chidananda pour la deuxième fois. Les deux swamis allaient avoir un effet profond sur le voyage spirituel de Marc.
La Rencontre avec Swami Abhishiktananda
Dès leur rencontre, Marc et Swami Abhishiktananda ont reconnu la nature profonde de leur relation de guru et disciple. Cette relation allait avoir un effet considérable sur la vie des deux hommes. Pour Swami Abhishiktananda, la rencontre devait le plonger dans l’expérience incomparable d’être le guru d’un disciple véritable et accompli, ce qui l’amènerait à réfléchir profondément sur la signification et le mystère du sannyāsa, et conduirait finalement à son propre Éveil. Pour Marc, la rencontre le conduira au « voyage sacré et irréversible » du sannyāsa et à une vie d’intense réclusion.
La Rencontre avec Swami Chidananda Saraswati
Alors que Swami Abhishiktananda était le guru principal de Marc, Swami Chidananda était l’autre maître spirituel qui a eu un impact crucial dans la vie de Marc et qui allait devenir son diksha-guru [2]. Swami Chidananda a encouragé Marc dans sa vocation à rechercher l’Absolu à travers le silence et la solitude ; peu après son arrivée en Inde, Marc a confié à Swami Chidananda son profond désir de solitude :
Je… lui ai parlé (Swami Chidananda) du besoin impérieux que j’avais de pratiquer la sadhana dans un silence total pendant un mois entier au cœur de la forêt. Il a accepté : « En effet, Dieu ne peut être trouvé que dans le silence et dans un état de non-faire »… Lorsque je lui ai confié mon intention… le Saint Homme a immédiatement répondu : « Pourquoi ne pas le faire maintenant ? C’est maintenant le bon moment pour le faire ! …Comme tout cela me semble mystérieux ! Est-ce vraiment une vie de silence total que le Seigneur me réserve ? … – il devient de plus en plus évident pour moi que c’est la volonté du Seigneur que je mène dorénavant une vie de réclusion et de silence absolu…
— Swami Ajatananda, Journal Spirituel, novembre 1971
La Lumière Éternelle
Pendant les deux dernières années de la vie de Swami Abhishiktananda, Marc a passé des périodes intenses et prolongées avec son guru (octobre 1971 – décembre 1973). Swamiji s’est consacré à initier Marc à l’essence des Upanishads et autres écritures sacrées. C’est au cours d’une de ces périodes d’étude intense que Marc a eu une profonde expérience spirituelle, en présence de Swami Abhishiktananda. Cette expérience a eu lieu le 10 mai 1972, alors que le guru et le disciple étaient en retraite ensemble à Phul Chatti Ashram, près de Rishikesh. Marc a décrit l’événement dans son journal intime :
…Je me trouve incapable de commencer à décrire l’expérience extatique… – cette Lumière infinie, non-duelle… En même temps, c’est la Vérité éternelle qui sous-tend l’existence même de mon être ultime, le « Je » non-duel que JE SUIS, au-delà de tout « Je »… JE SUIS LA LUMIÈRE PURE INFINIE : Paramjyotilina (qui demeure pour toujours dans l’indicible Lumière Suprême).
— Journal Spirituel, mai 1972
Swami Magni Ram Shastri, qui était présent à Phul Chatti en 1972, se souvient de la présence du guru et du disciple :
…J’ai rencontré les Swamis Abhishiktananda et Ajatananda à l’ashram de Phul Chatti lorsqu’ils ont séjourné avec nous en 1972… On les retrouvait engagés dans des études approfondies sur les rives du Gange. D’une certaine manière, ce couple nous rappelait Adi Shankaracharya et son époque. Bien qu’ils ne communiquaient pas beaucoup avec les membres de l’ashram, leur vie était une expression de fraternité et d’amour. Leur façon de s’adapter à notre style de vie était digne d’éloges. On aurait dit qu’ils étaient nés avec les vertus du discernement et de l’équanimité. Ils nous ont offert un exemple de fraternité interreligieuse en brisant les frontières de la religion et en les dépassant. Ils nous ont montré en silence un chemin qui élimine le fondamentalisme religieux que l’on trouve souvent dans les religions d’aujourd’hui.
Sannyāsa Diksha – Le Voyage Sans Retour
Sannyāsa…l’appel au renoncement total, qui est au-delà de tous les noms, de toutes les formes, et même de tout dharma.
— Swami Ajatananda, 1975 [3]
Le 30 juin 1973, Marc reçoit la sannyāsa diksha [4] sur la rive du Saint Gange, à Rishikesh, par S.S. Swami Chidananda Ji Maharaj, qui représente la tradition des Upanishads et la lignée monastique de Sri Ādi Shankarācārya. Swami Abhishiktananda a également assisté à la diksha et a représenté la tradition monastique occidentale de Saint Benoît et, plus largement, la tradition érémitique des Pères du désert. Après cette diksha, de forme œcuménique, Marc fut désormais connu sous le nom de « Swami Ajatananda Saraswati » (« Ajatananda » signifie la « félicité du non-né »).
Dès qu’il a été initié au sannyāsa diksha, Marc a commencé à errer. Il a écrit dans son journal intime :
J’ai pris conscience que je venais de m’engager dans un voyage irréversible – une voie qui me dépassait infiniment, dont je ne savais rien. Peu après ce moment… j’ai ressenti ananda, une félicité sans limite, dans l’océan infini du Soi glorieux…
— Journal Spirituel, id
La vie qui l’attendait maintenant était une vie de stricte réclusion.
Sans regarder en arrière, je suis parti pour le parivrājya [5]… Sans rien dire et sans m’arrêter, j’ai suivi mon chemin… sans objectif… sans rien savoir de ma destination… Désormais, il n’y avait plus de chemin à suivre – sauf le sentier tracé devant le Soi : « Le chemin des origines, imperceptible et insondable »…
— Journal Spirituel, id
Une vie de réclusion
La Vérité, comme j’en ai été témoin, n’a pas de visage (…). So’ham, je suis Cela : Il n’y a rien au-delà ! Cherche refuge dans la Vérité, et là seulement…
— Journal Spirituel, 1975
Après que Swami Abhishiktananda eut quitté son corps le 7 décembre 1973, Swami Ajatananda fut poussé à entrer dans une stricte réclusion, conformément à sa propre aspiration profonde et aussi à son souhait d’accomplir l’instruction de son Guru d’observer « au moins dix ans de silence ». En janvier 1975, après une longue recherche pour trouver un endroit approprié, il s’installe dans une kutiyā [6], située à 35 kilomètres en amont de Rishikesh, à Kaudiyala, où il restera absorbé dans une profonde méditation. En 1976, il part pour une parivrājya de quatre mois, vivant de la bhiksha [7] quotidienne, et parcourt les lieux saints et les sanctuaires de la région himalayenne de Kedar-Badri.
Après avoir atteint un état spirituel très élevé, Swami Ajatananda a mystérieusement disparu de sa kutiyā à Kaudiyala entre février et avril 1977. Personne ne l’a revu depuis.
Swami Abhishiktananda a écrit ce qui suit à propos de son disciple :
…il restera enfoui pendant de longues années, mais je suis sûr qu’un jour viendra où le fruit de son silence sera merveilleux. Mais en attendant, personne ne doit le déranger. Tout ce qu’il veut… c’est la solitude.
— (Lettre, 3.7.73)
Swami Ajatananda Saraswati fut un disciple direct et réalisé de Sri Swami Abhishiktananda. Il est l’auteur d’un journal spirituel, Années de Grâce (1971-1975), et Uttarakhand, Terre des Dieux : Un Pélerinage à Pied dans les Himalayas (1976) [non publié].
[1] Lit. « vision » ; ici, la vision d’un sage.[2] Le maître spirituel qui a initié le disciple.
[3] Swami Ajatananda, Avant-propos à The Further Shore, Delhi, 1975, p. xi.
[4] Lit. « initiation au renoncement ». La vie monastique consiste à renoncer aux liens du monde, à se consacrer à la contemplation et à se vouer uniquement au but qu’est la Libération ou la Réalisation spirituelle.
[5] Pérégrination sacrée.
[6] Ermitage.
[7] Aumône donnée à un sādhu.
Recommended Posts
Sri Swami Abhishiktananda
juillet 24, 2021
Sri Swami Chidananda Saraswati
juillet 24, 2021
Sri Chandra Swami Udasin
juillet 23, 2021